La déconjugalisation de l’AAH entre dans le droit avec un premier décret
Article publié le 29/12/2022 sur Hospimedia par Agathe Moret
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La réforme de l’allocation aux adultes handicapés prend forme. Un décret publié ce 29 décembre détermine les modalités de la déconjugalisation. « Un pas en avant très important » vers l’« autonomie » et la « dignité », selon Jean-Christophe Combe, qui sera complété avec la parution prochaine d’un second texte réglementaire.
Après des années de bras de fer entre Gouvernement et associations, la désolidarisation des revenus du conjoint dans le calcul de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) se concrétise. Ce 29 décembre, le Journal officiel publie ainsi le premier des deux décrets entérinant la réforme de la déconjugalisation attendue pour le 1er octobre 2023.
Le texte vient en application de la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat du 16 août 2022 (lire notre article). Il supprime la prise en compte des revenus du conjoint pour le calcul de la prestation, ainsi que les abattements applicables sur les revenus du conjoint en cas de réduction ou de cessation d’activité de ce dernier.
« Un pas en avant très important »
Aujourd’hui présentée par Jean-Christophe Combe, ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées, comme « un pas en avant très important vers l’entrée en vigueur d’une réforme attendue » et répondant à « une question d’autonomie et de dignité », la disposition a longtemps fait l’objet de polémiques. Après de nombreuses tentatives infructueuses de la part des parlementaires et une opposition marquée de l’exécutif (lire nos articles ici et là), Emmanuel Macron a finalement revu sa copie lors de la campagne présidentielle de 2022 en promettant de « bouger sur ce point » (lire notre article).
Qualifiée de « mesure de justice fiscale » pour les 270 000 personnes en situation de handicap qui vivent actuellement en couple, la déconjugalisation répond à deux enjeux : l’assurance d’une autonomie financière dans le couple dans un contexte de surreprésentation de victimes de violences conjugales parmi les femmes en situation de handicap (34% contre 19% en population générale) et le maintien du pouvoir d’achat. Selon une enquête réalisée par APF France handicap en 2019, 45% des femmes en situation de handicap signalaient en effet voir leur propre revenu impacté par celui de leur conjoint ou de leur foyer.
Les modalités du droit d’option détaillées
Ce nouveau mode de calcul, représentatif d’une dépense nouvelle annuelle de 560 millions d’euros (M€), devrait permettre à 160 000 bénéficiaires de voir leur AAH automatiquement majorée de 300 € en moyenne par mois. Dans le contexte où 45 000 personnes risqueraient de voir leur prestation minorée par la réforme, le décret prévoit un droit d’option. Ainsi, le nouveau calcul s’appliquera à tous les bénéficiaires avec un droit ouvert au titre du mois de septembre 2023, « sauf si cela leur est défavorable ».
Dans ce cas de figure, et uniquement dans ce cas de figure, les concernés pourront conserver un calcul conjugalisé de la prestation, « y compris en cas de renouvellement de leurs droits » tant qu’ils s’exposent à un manque à gagner. Un garde-fou qui représente 160 M€ de l’enveloppe consacrée à la réforme. « Cette règle cesse toutefois, définitivement, de leur être applicable dès que le montant calculé suivant les dispositions en vigueur à la date à laquelle leurs droits sont calculés est supérieur ou égal à celui calculé selon les modalités résultant de l’ensemble des dispositions en vigueur au 30 septembre 2023 », détaille le décret. Pour les nouveaux entrants dans le dispositif au 1er octobre 2023, la déconjugalisation constituera cette fois la règle de base.
Un second texte pour début janvier
Un second texte, prévu pour « début janvier », selon l’exécutif, prendra la forme « d’un décret simple ». Afin de prendre au mieux la mesure de la réforme, la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) élaborera un document « pour expliquer aux allocataires les conséquences de la réforme sur leur situation personnelle », détaille le Gouvernement dans un communiqué de presse.
« Les services des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et des caisses d’allocations familiales (Caf) veilleront à informer l’ensemble des personnes concernées pour qu’elles accèdent pleinement à leurs droits », selon Geneviève Darrieussecq, ministre chargée des Personnes handicapées. Ces actions de communication entendent « éviter au maximum le non-recours ».
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